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Jamaican Rum : Bringing the Funk !

7 mars 2023

Jamaican rum

Commençons par un court résumé de l’histoire du Rhum Jamaïcain…

Premièrement pour faire du rhum, il faut du sucre. Cette matière première fût introduite en Jamaïque en 1494 lors de la découverte de l’île par Christophe Colomb. Lorsque les anglais prirent le contrôle de la Jamaïque en 1655, ils rapportèrent avec eux leurs travaux et leurs connaissances sur la distillation. À cette époque, l’île possédait un grand nombre de distilleries, principalement développées grâce aux esclaves, qui étaient non seulement forcés de cultiver les cannes à sucre mais aussi forcés de distiller le rhum. Puisque les esclaves étaient les vraies personnes derrière l’art de distiller, l’industrie implosa lors de l’abolition de l’esclavage en 1893.

De nos jours seulement six distilleries exploitées par quatre sociétés sont actives :

  • Campari exploite Appleton Estate & New Yarmouth.
  • National Rums of Jamaica possède Long Pond & Clarendon
  • Everglades Farms distille Hampden Estate
  • Worthy Park dirige la distillerie de Worthy Park

Élaboration matières premières

Le rhum Jamaïcain est fabriqué à partir de jus de canne à sucre, de sirop de canne, de molasse ou n’importe quelle combinaison de ces derniers. Mais qu’elle est la différence entre ces sucres, me demanderiez-vous ?

Eh bien, le jus de canne à sucre est simplement le sous-produit du broyage de la canne à sucre. Le sirop de canne à sucre est fabriqué après le premier processus de raffinage du sucre, qui consiste à faire bouillir le jus de canne pour le concentrer (par évaporation d’une partie de son eau). La mélasse est le résultat d’une nouvelle étape d’ébullition suivie d’une centrifugation¹, qui sépare la partie solide du liquide. Différentes qualités de mélasses résultent de ce processus : la première mélasse collectée (appelée A-Molasses) sera une forme la plus pure. Suivie par la mélasse B obtenue lors d’une deuxième étape d’ébullition, puis une centrifugation. Et enfin, le blackstrap qui sera récupéré à la fin du processus. Cette molasse est très sombre et visqueuse avec beaucoup d’impuretés.

Quelle que soit la forme ou combinaison de sucre utilisée, il est toujours dilué avec de l’eau pour démarrer la fermentation, car les levures ne peuvent pas démarrer une fermentation si le taux de sucre est trop élevé.

¹La centrifugation est un procédé de séparation des composés d’un mélange en fonction de leur différence de densité en les soumettant à une force centrifuge.

La fermentation

Avant de commencer, nous avons besoin de détailler certains rudiments sur la fermentation du rhum jamaïcain.

Les esters : molécules très parfumées, ils ont typiquement des arômes fruités et floraux, jouant un rôle important dans l’aromatique des spiritueux.

Dunder : semblable au processus de Sour Mash Process du Bourbon, c’est un résidu de la distillation qui est concentré en acide carboxylique. Ce dernier a la capacité de se lier avec des molécules d’alcool pour former des esters. En Europe, on l’appelle Vinasse.

Muck : procédé unique formé par la décomposition de résidus de précédentes fermentations et distillations, de lies ou bien encore des restes de canne à sucre broyés stockés dans un trou creusé à même le sol. L’activité bactérienne forme une odeur très acide et désagréablement piquante.

Fermentation courte vs longue : une fermentation courte est un moyen très efficace de convertir le sucre en éthanol très rapidement (environ 24 heures), généralement ne générant pas d’arômes forts. Au contraire, une fermentation plus longue permettra aux levures de produire des taux d’esters plus élevés et donc des arômes plus prononcés. Souvent, après la fermentation, le liquide est laissé en cuve pour permettre une contamination bactérienne qui développe à son tour des nouveaux esters funky.

Le rhum jamaïcain se caractérise par des arômes puissants allant de la banane à l’ananas sur- mûris qui le rendent assez reconnaissables lorsqu’on le sent. Cet ADN fort est principalement créé par le processus de fermentation. Tous les distillateurs préparent leur liquide fermentescible avec différents composants comme une vraie recette de cuisine : chacun à la sienne et à ses secrets. Ils peuvent utiliser différentes combinaisons de sucres (jus de canne, sirop de canne, différentes qualités de mélasse), du Dunder, du Muck, différents types de levures, bactéries ambiantes et de l’eau pour diluer. Le but est de créer un liquide qui pourra développer un liquide riche en ester à la suite de la fermentation et la distillation.

La distillation

En ce qui concerne la distillation en Jamaïque, il existe une gamme très variée d’alambics et de modes de distillation. Allant de l’utilisation d’alambics à colonnes à d’alambics à retors (sorte d’alambic à repasse propre à la Jamaïque), l’objectif pour le distillateur est de fabriquer différents types de profils de rhum, chacun avec un profil aromatique spécifique. Ils sont appelés Marques (ou Marks). Ces Marques sont utilisées et assemblées par le maître distillateur pour créer son propre rhum embouteillé sous sa marque. Les Marques jamaïcaines sont très recherchées et peuvent être donc vendues indépendamment sur le marché du rhum d’assemblage.

La stratégie de distillation est souvent choisie en association du type de fermentation utilisé. Une fermentation courte sera généralement distillée dans un alambic à colonnes avec une rectification élevée créant une eau de vie légère appelée « Marque légère ». D’autre part, une fermentation plus longue se verra distillée en alambic à retors ou en alambic à colonnes avec une rectification plus légère afin de produire des Marques plus expressives. Des Marques de moyenne intensité sont aussi produites.

L’importance du rhum jamaïcain pour les rhums d’assemblage à travers le monde ont amené une classification des Marques. Un ancien système utilisait quatre grades de concentration en esters, allant de la plus légère à la plus élevée :

  • Common Clean
  • Plummer
  • Wedderburn
  • Continental

De nos jours, ce système a été abandonné et chaque distillerie possède sa propre classification des marques qu’elle produit au sein de sa distillerie.

La maturation

Certains rhums sont non vieillis et sont vendus peu de temps après la distillation.

D’autres vieillissements sont de courte durée pour différentes raisons. La première est liée au climat chaud des Caraïbes qui augmente le taux d’évaporation. Les styles plus légers sont rapidement déséquilibrés s’ils sont vieillis aussi longtemps que le cognac ou le scotch. La pression mise sur les distilleries par l’industrie du blend ne permet à la plupart des rhums de vieillir pendant de longues années. Certaines marques importent les jeunes rhums sur d’autres continents (principalement l’Europe), afin de bénéficier d’un climat plus frais favorable aux vieillissements prolongés.

La plupart des distilleries jamaïcaines vieillissent les eaux de vies destinées à être embouteillées sous leur propre marque dans des fûts de chêne américain recyclés de l’industrie Bourbon. Différentes tailles et âges de fûts peuvent être utilisés. Il n’y a pas de lois particulières définies sur la manière ou le temps d’élevage. Seules les Marques les plus concentrées pourront subir un long processus de vieillissement car l’estérification continuera à se développer en fût tout au long du vieillissement. Le meilleur exemple est la marque Appleton qui a une gamme de rhum vieilli de 8 ans, 12 ans, 15 ans et 21 ans.

 

Le rhum jamaicain et l’industrie du blend

Les blends de plusieurs distilleries ancrent leurs racines probablement sur les bateaux de la Royal Navy après que les anglais envahirent la Jamaïque. Quelques années plus tard, la ration quotidienne de Brandy fût remplacée par des assemblages de rhums des Antilles. Aujourd’hui l’industrie du rhum d’assemblage est au cœur des Caraïbes.

Cette dernière est fragmentée en deux parties :

  • les distilleries produisant leurs eaux de vies qui embouteillent sous leur marque et qui produisent pour le marché des rhums d’assemblages.
  • les entreprises non-productrices qui achètent des rhums de différentes distilleries pour faire leur propre assemblage et le vendre sous leur

 

Le rhum Jamaïcain de par ses arômes si marqués et uniques sont une ressource importante pour les entreprises non-productrices. Pour exemple :

  • Smith & Cross qui est une marque d’assemblage de plusieurs distilleries Jamaïcaines.
  • La marque Captain Morgan qui utilise une grande partie de la production de la distillerie
  • La boisson allemande Rum Verschnitt qui utilise des concentrés de rhum Jamaïcain dilués et sucrés afin d’être vendue à bas prix.

D’autres marques indépendantes comme Plantation (France), Fair (France), Duppy Share (Angleterre) ou Mezan (Angleterre) élaborent des rhums se repoussant souvent sur des assemblages contenant du rhum Jamaïcain.

La règlementation

Protégée par une IG, ou « Indication Géographique », la production de rhum jamaïcain doit suivre certaines règles strictes pour qu’il soit étiqueté comme tel. Voici quelques exemples :

  • La distillerie doit être située à proximité d’un bassin d’eau avec un sous-sol constitué de roche
  • Le rhum doit être fabriqué à partir de jus de canne à sucre, de sirop de canne, de mélasse, de sucre ou de toute combinaison de ces derniers.
  • La distillation doit avoir lieu dans un alambic en
  • Le rhum post-distillation peut être non vieilli ou vieilli en petits fûts de chêne en Jamaïque.
  • Seul l’adjonction de caramel (E150A) peut être ajouté aux rhums vieillis à des fins de coloration et de l’eau pour diluer le taux d’alcool
  • Aucun sucre ne peut être ajouté après la distillation.

 

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Kévin RIGAULT

Kévin RIGAULT 

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