Traversons l’Atlantique direction les États-Unis. Pour une fois, nous n’allons pas continuer notre route jusqu’au Far West et la Californie, mais nous allons rester à l’Est dans l’État de New-York. Je vous emmène plus précisément au Nord de cet état, tout proche de la frontière avec le Canada. Pas de déambulation dans la Big Apple mais bien au milieu de vignes entre plusieurs lacs. Vous l’aurez peut-être deviné nous allons explorer la région des Finger Lakes !
Quelques chiffres :
Elle fait partie des 7 régions viticoles de l’état de New-York qui est la troisième plus grande région viticole productrice de vin des États-Unis, après la Californie et l’état de Washington, et devant l’Oregon. Les Finger Lakes comptent près de 150 domaines et 4000 hectares de vignes. Elle est aussi la deuxième région productrice de jus de raisin du pays !
Six lacs la composent et sont en forme de doigts, d’où le nom de la région. Il y a le lac Canandaigua, le lac Keuka, le lac Seneca, le lac Cayuga, le lac Owasko et le lac Skaneateles.
La majorité des domaines sont concentrés autour du lac Seneca (le plus grand). Vient ensuite le lac Keuka et le lac Cayuga. D’ailleurs les lacs Seneca et Cayuga ont leur propre AVA (American Viticultural Area), ce qui montre bien l’implication des vigneron.nes de ces appellations à faire rayonner leur terroir.
Situation et Histoire :
C’est surtout pour la production de jus de raisin que cette région a tiré sa renommée aux USA. On y retrouve néanmoins des traces de viticulture vers 1829. Le Révérend William Bostwick cultivait des hybrides comme le Catawba et l’Isabella. Les hybrides sont, dit-on, résistants aux maladies, très productifs mais manquent d’aromatique et donnent des vins moins intéressants que des vins issus de vitis vinifera. Pour y être allé et les avoir goûtés, je peux vous dire que c’est à s’y méprendre. Mais revenons à la genèse de l’aventure viticole des FLX (acronyme pour désigner les Finger Lakes) parce que depuis, on y cultive aussi des vignes vitis vinifera.
Situé au niveau du 43ème parallèle (Bordeaux se situant entre le 44ème et le 45ème), le climat considéré comme froid, la viticulture n’est possible que grâce à deux facteurs. D’une part, les lacs de la région (qui sont très profonds) régulent la température surtout l’hiver et le reste de l’année. D’autre part, le lac Ontario, qui est plus au Nord mais dont la surface génère un « écran » de protection contre les grands froids qui seraient plus dommageables pour la vigne.
On plante les vignes sur les pentes aux abords des lacs pour bénéficier de leur effet modérateur et ainsi grandir. Les lacs étant d’origine glacière, les sols sont très drainants et peu riches. Conjugué avec un apport hydrique important tout au long de l’année, cela donne à la vigne de bonnes conditions de vie, surtout sur les pentes des lacs. Cela peut également provoquer des maladies à cause de l’humidité créée par les lacs en eux-mêmes.
Les vignes, situées en haut des pentes et au-delà, ne bénéficient pas des mêmes conditions, le sol est plus riche et donne donc beaucoup de vigueur. Vous le devinez la viticulture n’est pas chose aisée dans les FLX. Ce n’est pas n’importe quels cépages qui peut donc s’épanouir dans ces contrées.
Plusieurs expérimentations ont été menées. Il a fallu attendre la fin des années 50 avec l’arrivée du Dr Konstantin Frank, pionnier de la viticulture dans les Finger Lakes pour voir la « Révolution Vinifera » s’amorcer. Pour la petite histoire, Dr Konstantin Frank obtint son doctorat en viticulture à l’Université d’Odessa en Ukraine en 1930.
Il était alors un expert reconnu dans toute l’Europe de l’Est. Il a survécu à la seconde guerre mondiale et la révolution Russe et décida, à 52 ans d’immigrer à New-York pour donner un meilleur avenir à sa famille. C’est alors qu’il découvrit les Finger Lakes : des sols pauvres et des pentes qui plongent dans les lacs. Il y a vu un terrain de jeu idéal pour y planter des vignes vitis vinifera. Il commença par le Riesling, le Pinot Noir et le Chardonnay.
Accompagné de l’Urbana Wine Company, il parvint à faire diminuer l’usage de cépages hybrides (qui étaient parfaitement adaptés aux conditions climatiques du lieu), pour planter de plus en plus de cépages vitis vinifera.
Grâce à ces 30 années d’expérience en Europe de l’Est, où le climat continental peut rappeler celui des FLX, il implanta plus de variétés durant les années 70. Outre les cépages mentionnés plus haut, on y a implanté du Müller Thurgau, de l’Aligoté, du Cabernet Franc, du Merlot, du Sauvignon Blanc mais aussi du Saperavi et autres cépages géorgiens. Tous se sont bien acclimatés.
Au total 25 cépages vitis vinifera sont cultivés aujourd’hui au côté de cépages autochtones et hybrides.
En 1976, le « New York Farm Winery Act » reforma la régulation et les taxes sur les ventes de vins et autorisa les viticulteurs de l’État à vendre directement leur vin aux particuliers. Avant ça, la quasi-totalité des raisins étaient vendus à des coopératives. Cela a été un tournant et le début de ce qu’est la scène viticole des Finger Lakes aujourd’hui.
commun qui ressort des vins des FLX c’est la fraîcheur et la vivacité. Sur des cuvées d’exception, on notera de belles complexités et concentrations. C’est parait-il un terrain de jeu idéal pour la production des vins effervescents… En tout cas, toutes les conditions sont réunies ! On y produit également des vins de glaces, c’est pourquoi la région est connue outre-Atlantique.
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Gauthier Bernardo DipWSET